David Mastriforti

Le sang de l'alliance

Ce que ses jeunes ont exprimé au travers de leurs chants et de leurs sketches, de leur manière à eux, nous a touchés et interpellés. Si nous voulons que ce désir de fraternité et d’unité ne reste pas qu’un vœu pieux.

il faut comprendre le fondement sur lequel sont basées ces relations mutuelles.   

Dans le chapitre 14, de l’épître aux Romains, l’apôtre emploie 7 fois le verbe juger et exhorte par trois fois à ne pas juger : Qui es-tu, toi qui juges un serviteur d’autrui ? Pourquoi juges-tu ton frère ? Ne nous jugeons donc plus les uns les autres. Mais cette exhortation démarre à partir du chapitre 12 : « Je vous exhorte donc, frères, par les compassions de Dieu (à cause de cette immense bonté, au nom de cette miséricorde) à offrir vos corps comme un sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu… »

Dans quelques minutes, nous allons prendre la Sainte Cène. Ce n’est pas qu’un rituel ou qu’un symbole, car derrière ce symbole, il y a l’image de l’alliance que Dieu a faite avec nous. Quand Jésus institue la Sainte Cène, il dit : "Prenez, mangez, ceci est mon corps."  Il prend ensuite une coupe ; et après avoir rendu grâces, il leur donne en disant : "Buvez–en tous, car ceci est mon sang, le sang de l’alliance, qui est répandu pour beaucoup, pour le pardon des péchés." Matthieu 26 :26-28

Le sang, signe d'une alliance

Le sang est aujourd’hui encore un symbole universel de loyauté, d'engagement jusqu’à la mort. « Le sang de l’alliance, l’alliance en son sang » La notion d’alliance est très présente dans la Bible, de la Genèse à l’Apocalypse. L’alliance est mentionnée dans les 4 récits de l’institution de la Cène.

Quand Jésus parle du sang de l’alliance, il fait référence à des récits précis :

D’abord Abraham qui fait alliance avec Dieu. Alors le feu, symbole de la présence divine parcourt l’espace entre les animaux sacrifiés divisés en deux monceaux, par le chemin du sang, c.f.Genèse 15:8-21.

On retrouve cette idée, lors de la Pâques. Le chef de famille devait tuer l’agneau, puis appliquer avec une branche d’hysope son sang sur les deux montants et le linteau de la porte. Ceci accompli, les membres de la famille devaient rester dans la maison jusqu’au matin. Aucun mal ne pouvait leur arriver car ils étaient symboliquement couverts par le sang. Exo 12.13  « Le sang vous servira de signe (littéralement : de symbole) sur les maisons où vous serez ; je verrai le sang, je passerai au–dessus de vous, et il n’y aura pas sur vous de fléau destructeur, quand je frapperai le pays d’Égypte »

La porte

Le sacrifice ne se faisait pas dans la maison mais sur le seuil. Les patriarches, les peuples nomades pratiquaient souvent des sacrifices à l’entrée des maisons ou tentes, comme une manière d’assurer la protection de ceux qui entraient. Ainsi passer le seuil d’une maison avait un caractère sacré. L’endroit où le sang était versé était si sacré que même en entrant par cette porte, on ne devait pas marcher sur le seuil.

On comprend le lien entre le seuil et la protection, quand David dit dans Psaume 84:10 « […] Mieux vaut un jour dans tes parvis que mille ailleurs; Je préfère me tenir sur le seuil de la maison de mon Dieu. » Entrer dans une maison, liait la personne à un comportement moral envers tous les habitants de la maison.

C’est pourquoi Jésus dit en Jean 10  « En vérité, en vérité, je vous le dis, moi, je suis la porte des brebis. Tous ceux qui sont venus avant moi sont des voleurs et des brigands ; mais les brebis ne les ont pas écoutés. Moi, je suis la porte ; si quelqu’un entre par moi, il sera sauvé ; il entrera et sortira et trouvera des pâturages. Le voleur ne vient que pour voler et tuer et détruire ; moi, je suis venu, afin que les brebis aient la vie et qu’elles l’aient en abondance. »

Quand Jésus dit : « Je suis la porte », il s’agit plus qu’un passage, qu’un accès au Père, à Dieu : Il est lui-même le signe de l’alliance fait en son sang, à la fois médiateur et sacrifice. Et le fait de « fouler aux pieds le sang » signifiait que l’on montrait du mépris envers l’hôte. Un tel affront ne pouvait être toléré dans leur société. C’est dans cet esprit que l’auteur de l’épître aux Hébreux parle du châtiment qui attend « celui qui aura foulé aux pieds le Fils de Dieu, tenu pour profane le sang de l’alliance par lequel il avait été sanctifié, et qui aura outragé l’Esprit de la grâce ! » (Hébreux 10:29)

Les obligations solennelles du respect des engagements, étaient constamment rappelées aux Israélites par la pratique d’écrire les paroles de l’alliance de Deutéronome 6:4-9 et 11:13-21 sur les poteaux de leurs portes. C’était la coutume (superstitieuse ou devenue superstitieuse) pour tout bon Juif, de toucher le symbole de l’alliance chaque fois qu’il passait devant une porte. Il mettait son doigt dans sa bouche et disait le Psaume 121 : « l’Eternel gardera ton départ et ton arrivée, dés maintenant et à toujours »

N’avons-nous pas aussi tendance à devenir quasi superstitieux quand nous disons «  Je suis sous le sang de Christ », ou nous prions « Seigneur je place mes enfants, ma famille sous le sang », ou quand je prends la Sainte Cène par habitude ou de manière désinvolte, sans réaliser le signe qu’il représente. Le sang de Christ est le signe de notre alliance avec Dieu. La Croix est le  seuil de la vie éternelle, le chemin, l’accès au Père

Hébreux 10 :19-23 nous dit « Ainsi donc, frères, nous avons l’assurance d’un libre accès au sanctuaire (dans la maison) par le sang de Jésus, accès que Jésus a inauguré pour nous comme un chemin nouveau et vivant au travers du voile, c’est–à–dire de sa chair  (qui a été brisé et que nous célébrons tout les dimanche matin en rompant ce pain); et nous avons un souverain sacrificateur établi sur la maison de Dieu. Approchons-nous donc d’un cœur sincère, avec une foi pleine et entière, le cœur purifié d’une mauvaise conscience et le corps lavé d’une eau pure. Confessons notre espérance sans fléchir, car celui qui a fait la promesse est fidèle. »      

Vivre ensemble dans la maison de Dieu

Je n’ai pas à me placer sous le sang : j’y suis déjà. Et je peux être assuré ce matin, à cause du sang versé à la croix, que je puis entrer en sécurité avec mes frères et mes sœurs dans la maison de l’amour de Dieu. Pour cela je dois respecter les clauses de l’alliance : m’approcher avec un cœur sincère, avec une foi entière et pleine, dans la plénitude de la foi, une entière confiance, avec un cœur libre, purifié d’une mauvaise conscience.

Ceux qui font partie de la maison, ceux pour qui Christ est mort,  sont sacrés, car l’église, c’est son corps, c’est sa famille. Mépriser mon frère, le juger, le critiquer, c’est aussi mépriser l’alliance… Il ou elle, est peut être différent, parfois même pénible ou désagréable, mais sa valeur est inestimable, c’est un frère pour lequel Christ est mort.

Ce matin, d’une manière bien plus profonde que le sang versé comme une porte de sang avec Abraham, plus fort que tout le sang versé sur les autels juifs pendant des centaines d’années. Quand Christ est mort, c’est comme si Dieu avait levé la main et fait un serment dont le ciel et la terre sont témoins.

Quand nous prenons la Sainte Cène, nous proclamons que Dieu tiendra parole, parole de délivrance, de victoire, de guérison, de salut et de son retour. Dieu s’est engagé. Il ne s’est pas contenté de dire qu’il nous aimait : Il l’a prouvé, Il a scellé cette alliance d’amour par son sang.

Et nous ?

Comment aimons-nous le Seigneur ?  Et comment aimons les frères et sœurs ? Nous allons prendre la Cène ; c’est le moment d’aller les uns vers les autres, d’embrasser nos frères et sœurs, de leur dire que nous les aimons aimez, et si nous avons des a priori envers quelqu’un, c’est le moment de lui demander pardon. Allons vers ceux à qui nous ne disons jamais bonjour, allons vers ceux qui nous ont choqués, blessés, embarrassés… parfois une embrassade vaut mieux que mille discours, un saint baiser plus qu’une excuse. Pardonnons-nous réciproquement et accueillons-nous comme Christ nous accueillit.